Parler de la torture aussi en tant qu’historien
Il m’est souvent bien difficile de me faire entendre sur un tel sujet. C’est un problème auquel sont confrontés de nombreux historiens que se trouvent confrontés à des « porteurs de mémoire » qui estiment parfois être les seuls détenteurs de la vérité. Par exemple, certains ont dû mal à entendre que la guerre d’Algérie est une guerre polymorphe qui échappe à toute réduction manichéiste. Je rappelle parfois qu’en 1962 les membres de la plus grande zone militaire de libération nationale (wilaya) combattaient en entonnant le chant des partisans en français et ce simple rappel notamment choque souvent des interlocuteurs de l’autre camp qu’il soit français ou harki.
Les officiers de libération nationale se sont posés les mêmes questions que les officiers français.
Les officiers de l’armée de libération nationale qui a atteint une apogée en effectif en 1958 avec 50 000 hommes dont 30 000 aux frontières, se sont posés les mêmes questions concernant les exactions durant cette guerre qui a été atroce et certains ont même condamnés la torture : Zoubir pour l’Oranais, le commandant Azzedine (« l’ami de Bigeard ») pour l’Algérois, le commandant Bouderbala pour le Constantinois, le colonel Lotfi, chef de la Wilaya oranaise, le plus grand de tous, mort les armes à la main.
Ils ont réagi de la même manière que le général de la Bollardière quand ils ont appris que leurs combattants coupaient des nez, des mains…