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Etats-Unis : L’ouragan Katrina : l’incident du pont de Crescent (août 2005)
Posté par Peyron le 10/9/2005 5:30:00 (1543 lectures)

Pourquoi la police de Gretna a t-elle refoulé les réfugiés de la Nouvelle Orléans ?

A la suite du passage de l’ouragan Katrina en août 2005, des milliers de personnes de la Nouvelle Orléans se sont retrouvées sans logement et sans nourriture.

La Crescent City Connection, le pont qui enjambe le Mississipi et qui relie la Nouvelle Orléans à la ville de Gretna, constituait l’une des rares voies d’évacuation encore accessibles. Trois jours après l’impact du cyclone, 6 000 personnes ont traversé le pont à bord de bus. Le lendemain, un groupe de touristes qui venait du Quartier français rejoints par des centaines habitants de la Nouvelle Orléans en majorité de race noire, ont commencé à traverser à pied le pont avant d’être bloqués par des policiers de race blanche de la ville de Gretna qui ont commencé à tirer des coups de fusils au-dessus de leurs têtes et qui leur ont demandé de rebrousser chemin.

L’un des réfugiés a demandé à l’un des policiers les raisons de ce blocage. Il lui a été répondu que "Gretna n’était pas la Nouvelle Orléans et qu’il n’y avait pas de Superdome (1) à Gretna. "
Cette réponse a été interprétée comme voulant dire « nous ne voulons pas d’afro-américains ici à Gretna ».

Comme les réfugiés s’apprêtaient à camper sur le pont pour passer la nuit, un policier a sillonné à grand vitesse le pont au bord de son véhicule, a hurlé au travers de son haut parleur « Foutez-moi le camp de ce pont » et a menacé de son arme plusieurs réfugiés.
Quelques instants plus tard, un hélicoptère de la police a survolé en rase motte le pont forçant les réfugiés à quitter le pont.

Plus tard, le Maire de la ville de Gretna expliquera qu’en aucun cas, les 17 000 habitants de sa ville, issus de la classe moyenne, ne sont racistes et que de plus, 35% de la population est noire. La ville de Gretna était alors elle-même confrontée aux mêmes problèmes que la Nouvelle Orléans et qu’elle n’était en aucune mesure capable de porter de l’aide à des personnes extérieures. Il soutient la décision prise par le responsable de la police de fermer la circulation sur le pont.

Selon lui, la situation était intenable : déjà plus de 5 000 réfugiés s’entassaient déjà sur la rive ouest du Mississipi où se situe Gretna et des informations faisaient état de cas de pillage et de la circulation d’armes. Ce qu’il apprenait par les media sur la situation chaotique à la Nouvelle Orléans où des policiers avaient été pris pour cible par des malfaiteurs, l’a encouragé à considérer que la sécurité des habitants de Gretna devait être sa priorité.

Pour le président du conseil municipal de la Nouvelle Orléans, Oliver Thomas, qui était présent sur les lieux, l’explication du maire de Gretna n’est pas recevable. Le pont Crescent est placé sur la seule responsabilité de l’Etat de Louisiane et donc de celle du Gouverneur et non pas de celle du Maire de Gretna. Si, comme le revendiquent les forces de police de Gretna, celles-ci se sentaient menacées par des gens déshydratés et affamés, il serait grand temps de les remplacer.

Dans les jardinets de plusieurs maisons de Gretna ont fleuri des panneaux qui remercient le maire et le responsable de la police pour les décisions qu’ils ont prises. Le conseil municipal a voté par la suite une motion qui affirme « L’entrée en ville d’individus aurait fait courir un risque inacceptable aux habitants de Gretna ».

Une enquête menée par l’attorney général de Louisiane est en cours pour déterminer si des lois ou des droits fondamentaux n’auraient pas été respectés lors de cet incident.

Pour certains analystes, l’importance des pillages et des délits perpétrés à la Nouvelle Orléans à la suite du cyclone, a été très largement surestimé par les media. Elle ne serait pas supérieure à celle constatée dans des circonstances normales. Cette image négative des habitants de la Nouvelle Orléans vient se rajouter à leurs difficultés présentes et n’est pas prête d’être oubliée par l’opinion publique.
Pour ces analystes, les moments de grande tension sociale ont tendance à révéler les traits cachés d’une société.

D’après CBS News, NY Times


(1) Centre sportif couvert de grande capacité dans lequel des milliers de réfugiés, à majorité de race noire, ont été regroupés par les autorités locales.

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